vendredi 22 mai 2009

Mystères...

Il est des dieux qui se cachent plutôt bien, quand ils le veulent. La Phrygie en dissimule beaucoup. Combien de cultes à mystères se réclament de ses montagnes ? Quel poète grec n’a pas un instant rêvé à ses forêts et à ses sources ? La Phrygie d’aujourd’hui ne paraît pas si merveilleuse qu’elle ait produit tant de cultes étranges et mystérieux… Et pourtant… une bacchante célébre à grands cris la flûte phrygienne, les cymbales et le tambourin de Dionysos, qui aurait fondé là ses mystères. Tout près de la Grande Mère des dieux, la déesse de Pessinonte à la Pierre Noire, ou des sommets Didyméens, la Bérécynthienne trônant au milieu des lions… Cybèle, Angdistis, Mètèr Theôn, ses multiples noms cachent-t-ils différentes déesses, à la maternité si souvent caractéristique en Anatolie pour qu’on parle de « mères anatoliennes » ? Elles qui se cachent fréquemment derrière le visage et le nom d’une Artémis...
Cybèle, la Mère phrygienne, dont les mystères ont tôt envahis la Grèce et Rome, où on lui immolait des taureaux pour se purifier. Elle que le poète nous dit avoir initié Dionysos à ses propres mystères… Ce dieu qui en nourrit tant ! Qui prête parfois son nom, par une gênante confusion, à Zeus Sabazios, dieu de l’orage que l’on dit phrygien et dont les mystères serpentiformes ont gardé leur clé bien enfouie dans le passé.

Emilie HASPELS, Highlands of Phrygia.

Un Zeus aux airs de Dionysos, que l’on dit venir de Phrygie… mais a-t-il à voir avec ce Zeus Dionysos qui voisine le Brontôn et la Mère des dieux ? Est-il ce Zeus qui nourrit les vignes et les bœufs, ce Dionysos coiffé de lierre et de pampre que Pan réjouit de sa flûte sur quelques autels ? Lui que les dieux des morts et de la justice accompagnent, comme on accompagne un maître source de pureté ? La question reste ouverte…La réponse est-elle ces serpents qui ondulent et enserrent des arbres sur les autels ? Ces chèvres qui se repaissent de raisin ? Ces bacchants portant le thyrse ?
Voici un extrait des Bacchantes d’Euripides… ces femmes qui effrayèrent les Thébains, réfractaires à la puissance de ce dieu barbare descendu des montagnes asiates pour porter la fureur purificatrice de ses mystères sur la terre de Zeus, son père…

O bienheureux celui qui par une faveur du Destin est initié aux mystères des dieux ! il sanctifie sa vie; le thiase exalte son âme, sur les montagnes où il célèbre Bacchos, par de saintes purifications. Heureux qui célèbre les Orgies de la Grande-Mère, de Cybèle, suivant la loi divine, et, brandissant le thyrse, couronné de lierre, sert Dionysos ! Allez, Bacchantes. Allez, Bacchantes. Bromios, dieu, fils de dieu, Dionysos, emmenez-le des montagnes de Phrygie aux villes florissantes de la Grèce, Bromios...

Pour la Phrygie, Dionysos est si peu présent qu’on se demande d’où vient le rêve. Pourtant… pourtant il est là, diffus, écartelés en symboles épars. La clé des mystères est-elle en ces terres qui, malgré tout, restent bien mystérieuses ?

vendredi 15 mai 2009

Fais couler le sang de dieu...



Déverse l’ichor sur mes mains, que je lave un crime qui jamais ne fut miens…
Entrouvre les cuisses de la putain, qui entortille tes rêves de ses liens…
Egorge le taureau qui ploie la tête, comme une victime parfaite
Et sois le païen qui aime son passé comme on viole une tombe secrète.
Efface cette histoire qui te déplait, chasse ce cauchemar dans lequel tu es né.
Refoule dans les limbes clochers et mosquées qui te gênent pour avancer.
Reviens sur tes pas pour vaincre sur le cours de la Rivière Froide,
Et triomphant sur ton char d’or, marche au panthéon des mascarades.
Tu peux faire revivre les démons et héros oubliés, en sacrifiant un dieu
Et consacrer de nouveau une Rome prostituée, telle une pierre de vœu.

Tu peux aussi entrer dans un temple transformé, regarder vers le ciel
Y voir l’ombre du sacré, pur et sans nom, dénué de face et de fiel
Déchausser tes pieds chez le prophète ou pleurer sur le mur de Jérusalem
Ecouter bruire les arbres d’une forêt, être le sorcier qui ressent et aime.
Que chercher dans le passé sinon la mémoire d’une sagesse immortelle ?
Que faire des cantiques qui vibrent en ton cœur comme la voix d’une belle ?
Veux-tu être celui qui rouvre les plaies et fait saigner les dieux sur terre ?
Ou bien celui qui joue à l’enfant et bénit le jour éphémère ?
Je bois le vin comme le sang, je ne crois que ce que je ressens
Je cherche le divin dans mon âme et dans les yeux des gens.
Crois-moi le temps présent est celui que les dieux t’ont légué,
Ne le gâches pas à vouloir en faire un plus-que-parfait…

Tom